Dans un contexte de flambée des prix, beaucoup de salariés attendent les négociations annuelles obligatoires (NAO) dans leurs entreprises. C'est à cette occasion que délégués syndicaux et employeurs rediscutent de la question des salaires. 2022 a vu le retour des augmentations collectives, mais à des taux très inférieurs à l’inflation, suscitant de fortes attentes des salariés pour 2023.
L'augmentation de la rémunération est devenue l'enjeu majeur des négociations annuelles obligatoires (NAO), notamment dans un contexte d'une augmentation durable et généralisée des prix.
La question des augmentations de salaires est sur le devant de la scène. Ces douze derniers mois, elle n’a jamais cessé d’être une préoccupation majeure pour les travailleurs, salariés comme fonctionnaires, qui ont vu fondre leur pouvoir d’achat à mesure que montait l’inflation.
L'inflation grignote le pouvoir d'achat. Elle surfe sur la crête des 6 % annuels et devrait rester à ces niveaux élevés encore une bonne année. Conséquence : la grogne monte chez les salariés.
Face à l’inflation, les augmentations générales sont au centre des négociations
Dans la plupart des entreprises, tout se jouera lors des négociations annuelles obligatoires (NAO). Les NAO sont une obligation légale pour toutes les entreprises de plus de 50 salariés. Elles interviennent en général entre novembre et février. Avec une inversion de tendance…
Avant, on raisonnait par rapport à la performance, en augmentation individuelle. Aujourd'hui, avec le contexte économique de crise, on parle d'augmentations générales.
L’augmentation des prix touche tout le monde, à tous les postes, à tous les niveaux hiérarchiques, a redonné tout son sens à la demande d’une augmentation générale des salaires dans les entreprises, alors que cette mesure n’avait cessé de reculer ces dernières années, au profit d’augmentations individuelles.
En réponse à l’inflation galopante, les DRH accélèrent la fréquence des négociations salariales : une stratégie qui reste celle des petits pas, où les augmentations se succèdent tous les trois ou six mois. Certaines entreprises ont avancé leurs négociations annuelles obligatoires (18 % selon l’étude étude de rentrée de l’ANDRH), et celles qui ne l’ont pas fait ont souvent instauré des « clauses de revoyure » pour rediscuter en cours d’année les accords décidés au début de 2022.
SNCF, GRDF, Sanofi… Les premières négociations annuelles obligatoires (NAO) ont eu lieu récemment et d’autres démarrent dans un climat social tendu. 2022 a vu le retour des augmentations collectives, mais à des taux très inférieurs à l’inflation, suscitant de fortes attentes des salariés pour 2023.
Ce mercredi 7 décembre par exemple, les NAO débutent à la SNCF, et les syndicats se sont d'ores et déjà fait entendre.
Les négociations salariales annuelles obligatoires se sont achevées chez la plupart des énergéticiens français. Le groupe EDF a donné le ton en octroyant dès le mois d'octobre une augmentation générale de 2,3 % pour 2023, venant s'ajouter à des mesures d'avancement individuelles en hausse de 2,45 %.
Cumulées aux hausses de salaires octroyées dans la branche des industries électriques et gazières (IEG), ces mesures doivent permettre - selon la CGT - de passer le cap d'une augmentation générale de 200 euros par mois pour tous les salariés. Ce n'est pas rien pour EDF. Actuellement dans une situation financière très délicate, cela doit conduire à une hausse de la masse salariale du groupe de l'ordre de 9 %.
Les NAO de STMicroelectronics se dérouleront en mars 2023, dérogeant à une autre tendance remarquée cette année : l’avancement des dates de négociations. On rencontre ce cas de figure chez plusieurs grands groupes, dont Stellantis. À la demande des syndicats, le constructeur automobile a avancé la date des discussions au 1er décembre 2022, au lieu de février 2023. « L’objectif de cette journée est de négocier un accord équilibré tant pour les salariés de l’entreprise que pour la compétitivité de l’entreprise », commente sobrement le groupe.
Chez Orange, la prochaine NAO a également été avancée d’un mois par rapport à la pratique habituelle, en janvier 2023. A l’issue de la précédente NAO clôturée en avril, la direction avait fini par décider unilatéralement d’une augmentation de la masse salariale de 3%.
Syndex, qui a analysé les procès-verbaux de 63 négociations de 2022 dans 18 secteurs différents, a découvert que 90% des accords étudiés intègrent des augmentations collectives. Très inhabituel. « On n’en a pas vu autant depuis vingt ou trente ans ! s’exclame Yoël Amar, expert en diagnostic social et économique pour Syndex. En moyenne, les augmentations collectives atteignent 2 à 2,5%. Le gâteau de la masse salariale reste inférieur à l’inflation. » D’où les appétits syndicaux pour 2023…
L’inflation a, du même coup, revivifié la grève comme mode d’action collectif, pour créer un rapport de force dans l’entreprise. Avant, pendant, ou après les négociations annuelles obligatoires, cadre des discussions sur les salaires et le partage de la valeur. Et signé le retour de la conflictualité dans les entreprises depuis un an.
Toutes les entreprises n’ont pas les mêmes marges de manœuvres
Les entreprises savent qu’elles ne pourront pas ignorer les demandes d’ajustement sur l’inflation lors des négociations annuelles obligatoires sur les salaires.
Pour certains DRH, les NAO devraient être plus compliquées que pour d’autres, car les entreprises sont plus ou moins résistantes au risque inflationniste. En clair, comme pour tout, il y a des gagnants et des perdants, et donc des entreprises qui plus que d’autres peuvent plus facilement répercuter la hausse de l’inflation dans les salaires.
Une récente note du cabinet Syndex, spécialisé dans le conseil aux représentants des salariés, en a établi la typologie en quatre catégories : les « indifférentes », les « bénéficiaires », les « vulnérables » et enfin les « résistantes » à l’inflation.
Au nombre des « indifférentes », on retrouve ainsi les entreprises qui ont peu de pouvoir de négociation des prix avec leurs clients, mais dont les coûts sont largement fixes, comme les prestataires de services professionnels.
Une entreprise qui, en revanche, a une forte capacité de négociation pour relever ses prix, et des coûts largement fixes ou liés à des contrats à long terme, sera « bénéficiaire » durant les périodes d’inflation. C’est le cas des compagnies pétrolières. TotalEnergies, par exemple, avait les coudées franches pour augmenter les salaires.
Typiquement, les « vulnérables » sont les entreprises avec une forte variation des coûts liée aux éléments nécessaires à la production (les intrants), et peu de pouvoir sur les prix dans un marché très concurrentiel. Syndex cite, sur ce profil, les entreprises de l’édition et la presse, où les négociations pourraient être compliquées.
Enfin, l’entreprise « résistante » évolue dans des secteurs de marché où les dynamiques de prix se propagent dans la chaîne de valeur, mais où les capacités à les transmettre aux clients sont fortes grâce à des stratégies de tarification, comme dans la grande distribution, ou de différenciation comme dans le luxe.
Avec des prix qui vont continuer à augmenter, les prochaines négociations de salaires s'annoncent mouvementées. Dans de nombreuses entreprises les calendriers des négociations salariales sont bouleversés.
D'habitude, direction et partenaire sociaux négocient une fois par an à l'occasion des négociations annuelles obligatoires (NAO). En 2023, face à l'inflation et à la pression des syndicats, de nombreuses entreprises vont être contraintes de rouvrir des négociations et d'accorder des augmentations supplémentaires…
Publié le 7 décembre 2022
Sources : L’Usine Nouvelle, Cabinet Syndex, Le Monde
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